Pharmacologie cardiovasculaire

2018-2019

1 Système rénine-angiotensine-aldostérone

Il existe beaucoup de médicaments agissant à différents niveaux sur le système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA). Certains agissent aussi sur le système kalicréine-kinine en même temps. Ces 2 systèmes ont une action antagoniste :

Résumé des cibles du système rénine-angiotensine-aldostérone
 Les médicaments actuels visent à diminuer l’action du SRAA en agissant sur les cibles en bleu encadrées rouges :

Ils possèdent certaines propriétés et effets indésirables communs :

-​ Ils induisent une hyperkalémie​​ - Ils sont diurétiques permettant une diminution de la volémie. - Ils sont​ antifibrosant​​ et donc néphroprotecteurs et cardioprotecteurs.

1.1 Les inhibiteurs de la rénine

Un médicament inhibiteur compétitif de la rénine a été développé : l’aliskiren. Ce médicament est commercialisé mais a été déremboursé récemment, les études montrant une efficacité sur les paramètres biologiques mais pas sur des critères cliniques. Il est conseillé de ne pas l’utiliser.

1.2 Les inhibiteurs de l’ECA (IEC)

Tous se terminent par le suffixe ​ « pril ». Le captopril est le chef de file de cette classe (premier à avoir été commercialisé), l’enalapril est le plus utilisé, il en existe d’autres comme le ramipril, etc. Ce sont des inhibiteurs compétitifs réversibles.

1.2.1 Indication des IEC

Indications des différents IEC
 

1.2.2 Propriétés pharmacodynamiques

Les IEC sont des des inhibiteurs compétitifs réversibles de l’ECA qui entraînent :

Les action de l’angiotensine II
 Les IEC inhibent toutes les actions physiologiques de l’angiotensine II :

Des hypothèses indiquent qu’une partie de l’effet bénéfique des IEC est due à leur influence sur le système kinine-kallikréine. Cela englobe les effets sur l’hypertension artérielle, sur le remodelage ventriculaire (après un infarctus du myocarde) et éventuellement sur la néphropathie diabétique. Cependant cette influence est aussi pourvoyeuse d’effets indésirables.

1.2.3 Propriétés pharmacocinétiques

Les IEC sont des acides directement actifs (ex : captopril) soit des esters qui subissent une hydrolyse (ex : énalapril → énalaprilate) donnant l’acide actif. Ils ont une élimination rénale majoritaire ou exclusive, il faut prendre des précautions chez le sujet âgé et l’insuffisant rénal (adaptation de la posologie à la clairance de la créatinine)

1.2.4 Effet indésirables Attendus ou Augmentés, type A

Dans le glomérule rénal le débit sanguin afférent est supérieur au débit sanguin efférent car une partie du flux permet de produire l’urine. Sous IEC le débit afférent se rapproche du débit efférent : tout patient sous IEC, même en bonne santé, développe une insuffisance rénale fonctionnelle qui se compense le plus souvent. Toutefois cette compensation ne se fait pas toujours, surtout chez les sujets sous diurétiques ou AINS, ceux qui suivent un régime sans sel, et les patients âgés .

1.2.5 Effet indésirables Bizarres (type B) :

Angioedeme
 

1.2.6 Interactions médicamenteuses

1.2.7 Contre indications

1.3 Les antagonistes du récepteur AT1 (ARAII)

Ces médicaments sont des antagonistes compétitifs des récepteurs AT1 à l’angiotensine. Ils portent le suffixe ​ « sartans ». Le chef de file est le losartan, il existe aussi le irbésartan, candésartan..

1.3.1 Indication des ARAII

Indications des différents ARAII
 

1.3.2 Propriétés

Ils possèdent globalement des propriétés, des effets indésirables et des contre-indications similaires aux IEC, avec quelques différences toutefois :

1.4 ARNI (angiotensin receptor - neprelysin inhibitors)

C’est une catégorie nouvelle qui contient un médicament récent associant le valsartan avec le sacubitril (spécialité Entresto°).

Inhibition de la NEP
 Le sacubitril est un inhibiteur de la néprelysine ou endopeptidase neutre (NEP) qui hydrolyse et inactive divers peptides, dont les peptides natriurétiques ANP et BNP, ainsi que la bradikinine. L’inhibition de l’endopeptidase neutre (le sacubitril) empêche la dégradation des peptides natriurétiques, augmentant leur concentration dans le plasma et leurs effets : vasodilatation et action diurétique.

Cette action est normalement compensée par l’activation du SRAA qui possède une action antagoniste puissante et qui annule les effets du sacubitril. L’association du sacubitril avec le valsartan qui bloque l’action de l’angiotensine permet d’obtenir une action efficace sur la tension artérielle.

Dans le traitement de l’insuffisance cardiaque, un essai clinique a montré une meilleure efficacité de ce médicament par rapport au traitement de référence, l’énalapril.

1.5 Inhibiteurs du récepteur aux minéralocorticoïdes

Ce sont des​ antagonistes compétitifs du récepteur aux minéralocorticoïdes (RM) qui portent le suffixe ​ « lactone »​​.

1.5.1 Indications

Ce médicament est utilisé chez l’enfant :

Chez l’adulte il est indiqué dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque stade III ou IV selon la classification de la NYHA (fraction d’éjection systolique ≤35%), voir la partie sur l’insuffisance cardiaque.

La spironolactone a démontré son efficacité dans l’IC et a été prescrit largement pour traiter cette maladie. Par la suite il a été responsable d’une épidémie d’hyperkaliémies : les patients insuffisants cardiaques sélectionnés pour l’étude avaient une IC modérée, sans comorbidités, sans associations nombreuses de médicaments, son utilisation en conditions réelles a révélé cet effet indésirable majeur qui n’avait pas été repéré.

1.5.2 Description et mode d’action

Les récepteurs aux minéralocorticoïdes
 Les RM sont des récepteurs cytoplasmiques qui se lient à une molécule d’aldostérone après sa traversée de la membrane plasmique. Deux RM activés dimerisent puis migrent dans la noyau où ils se fixent sur l’ADN et activent la transcription du collagène entraînant des fibroses et d’un co-transporteur provoquant la réabsorption d’H₂0 et Na⁺ et la sortie de K⁺ vers l’urine au niveau du tubule rénal. Les lactones bloquent la dimérisation des RM empêchant ainsi leur effet. La spironolactone est décrite comme ayant un effet inotrope positif.

Il existe aussi des ​pseudo-antialdostérone comme l’amiloride ​qui fonctionnent en inhibant le transporteur Na⁺/K⁺ de manière non compétitive, qui ne possèderont pas l’action antifibrosante.

1.5.3 Effets indésirables et précautions

2 Les anti-calciques

Les cellules cardiaques comme les cellules musculaires lisses vasculaires nécessitent un flux de calcium pour leur contraction. Au repos, l’ion calcium est quasiment absent du cytoplasme, il se trouve dans le réticulum endoplasmique et dans l’espace extra-cellulaire. Il existe des canaux et des pompes qui permettent le passage de cet ion d’un compartiment à l’autre.

Flux de calcium
 Les canaux calciques dépendants du voltage (VOC) sont des cibles importantes en pharmacologie. Il en existe deux types :

Cellules et canaux calciques
 

Les antagonistes calciques sont aussi appelés « Anticalciques » , « Antagonistes calciques » , « Inhibiteurs calciques ». Ils sont classés en fonction de leur tropisme pour le cœur ou pour les vaisseaux. Des médicaments ayant la même cible peuvent avoir des effets différents, probablement en raison de particularités physico-chimiques. Il existe 2 grandes familles d’inhibiteurs calciques :

Indications des inhibiteurs calciques
 Il existe aussi une autre molécule, le bepridil, qui antagonise les canaux Ca²⁺ et Na⁺. Il possède une indication dans la prévention de l’angor. Il n’est plus commercialisé en France.

2.1 Dihydropyridines

Ils se terminent tous par le suffixe « -dipine », le chef de file est la Nifédipine. Ce sont des médicaments vasculotropes : ils ont des effets sur les vaisseaux et la circulation sanguine.

2.1.1 Utilisations

Utilisations des dihydropyridines
 

2.1.2 Effets

Sur la circulation systémique, ces médicaments possèdent un puissant effet vasodilatateur sur les territoires artériels et veineux. Ils diminuent la précharge par vasodilatation veineuse mais leur action la plus importante est une diminution de la postcharge par vasodilatation artérielle. On observe une baisse de la pression artérielle, sans tolérance, entraînant une augmentation réflexe de la fréquence cardiaque. Le cœur bat plus vite et consomme plus d’O₂, ce qui peut avoir des conséquences délétères sur un cœur malade. La double dilatation (artérielle et veineuse) peut entraîner la survenue d’œdèmes des membres inférieurs, effet indésirable fréquent.

Effet des dihydropyridines sur la circulation coronaire
 Sur la circulation coronaire, l’effet favorable recherché sur la circulation coronaire est un effet antispastique pour traiter l’angor de Prinzmetal (ischémie au niveau des territoires coronaires par spasme des artères coronaires pouvant déterminer une souffrance du myocarde). Mais il peut aussi y avoir des effets indésirables : le phénomène de vol sanguin coronaire par dilatation des territoires artériels en aval de l’aorte, détournement du sang de la circulation coronaire au profit d’autres territoires artériels avec un risque ischémique.

Sur la circulation cérébrale, l’effet recherché est aussi un effet antispastique, au niveau des artères intracrâniennes. Cet effet est mis à profit pour lutter contre les conséquences de l’hémorragie méningée : des spasmes au niveau des artères cérébrales, qui peuvent être traitées avec la nimodipine. Il existe aussi des effets indésirables : les dihydropyridines déclenchent des céphalées chez 20% des patients.

2.1.3 Propriétés pharmacocinétiques

On favorise l’utilisation de molécules et formes galéniques à longue durée d’action. De nouvelles formulations galéniques sont en cours d’élaboration, par exemple de la Nifédipine en Libération Prolongée (LP), pour transformer l’effet brutal en effet progressif. Le métabolisme dépend du CYP3A4 pour toute cette classe de médicaments.

2.1.4 Les effets indésirables et précautions d’emploi

L’association avec le Dantrolène (voir dessous) est contre-indiquée car elle entraîne un risque de fribrillation ventriculaire. Il faut prendre des précautions d’emploi avec :

2.2 Phénylalkylamines

Le vérapamil est la seule phénylalkylamine sur le marché. Ce médicament possède un tropisme cardiaque prédominent.

2.2.1 Utilisation

Le vérapamil possède une indication dans le traitement de :

Le vérapamil est contre-indiqué dans l’insuffisance cardiaque à cause de son effet inotrope négatif.

2.2.2 Effets du vérapamil

Effets cardiaques du vérapamil
 Au niveau nodal il agit sur la pente phase 4 du potentiel d’action en ralentissant l’entrée de Ca²⁺ durant la phase 4, aplatissant la pente de dépolarisation spontanée ce qui entraîne :

Au niveau myocardique il provoque une triangulation potentiel d’action, en écourtant la phase 2 (plateau calcique), ce qui diminue l’inotropisme (force de contraction). Chez le sujet âgé il peut déclencher une insuffisance cardiaque. Il possède aussi un faible effet vasorelaxant sur le vaisseau.

2.2.3 Propriétés pharmacocinétiques

Le vérapamil induit l’inhibition puissante du CYP3A4 et l’inhibition de la P-glycoprotéine PGP. La PGP est un canal, produit du gène Multi Drug Resistance MDR, qui permet d’expulser les xénobiotiques hors de l’organisme (mécanisme de détoxification).

Le vérapamil était utilisé pour empêcher l’élimination de médicaments anti-cancéreux. Les patients atteints d’un cancer résistent aux médicaments grâce à une PgP très active.

2.2.4 Effets indésirables et précautions d’emploi

Le vérapamil est contre-indiqué en cas de dysfonction sinusale, de blocs auriculo-ventriculaires, d’insuffisance ventriculaire gauche ou de bradycardie sévère (inférieure ou égale à 40 battements par min). Il interagit avec les médicaments modificateurs des courants calciques :

2.3 Benzothiazépines

Le diltiazem est le seul représentant de cette classe sur le marché.

2.3.1 Indications

Le diltiazem est indiqué dans le traitement préventif des crises d’angor stable ainsi que dans la prise en charge de l’hypertension artérielle.

2.3.2 Pharmacodynamie

Le diltiazem freine l’entrée transmembranaire du calcium au niveau de la fibre musculaire myocardique et de la fibre musculaire lisse des vaisseaux. Ce mécanisme produit une action bradycardisante modérée sur des fréquences cardiaques supérieures ou égales à 75 battements par minute ainsi qu’une vasodilatation artérielle modérée par l’amélioration de la compliance des grosses artères.

2.3.3 Effets indésirables et précautions d’emploi

Le diltiazem est susceptible d’entraîner :

Ce médicament ne doit pas être pris en association avec le dantrolène (risque de fibrillation ventriculaire), le pimozide, les ergotés, la nifédipine (risque d’hypotension) et l’ivabradine (risque de bradycardie excessive). Il est généralement déconseillé en association avec les antiarhytmiques (bêta-bloquants, bradycardisants) car il existe des risques cardiaques.

2.4 Autres médicaments assimilés aux anticalciques

2.4.1 Médicament du canal RyR2

Le dantrolène est le seul inhibiteur du canal RyR2 sur le marché. Il bloque la sortie du Ca²⁺ du réticulum endoplasmque au niveau des muscles striées squelettiques. Il est utilisé pour lutter contre la « spasticité » c’est-à-dire la contraction anormale des muscles.

Il y a un risque d’interactions médicamenteuses, en particulier une contre-indication en association avec les anticalciques car il existe des risques de tachycardie ou fibrilation ventriculaire. Les effets indésirables du dantrolène sont :

2.4.2 Médicaments agissant sur l’AMPc

Action sur l’AMPc
 L’activation du récepteur β-adrénergique au niveau du cœur active l’adénylate-cyclase qui forme de l’AMPc à partir de l’ATP. La phosphodiesterase 3 (PDE3) dégrade l’AMPc pour reformer l’ATP.

La Dobutamine est un agoniste α et β adrénergique inotrope positif, chronotrope positif, bathmotrope positif. Il augmente la consommation d’O₂. On s’en sert dans 2 situations cardiologiques :

L’enoximone est un inhibiteur de la PDE3. Il Ce médicament est chronotrope positif, inotrope positif et bathmotrope positif, il augmente la consommation d’O₂. On l’utilise dans le traitement de courte durée de l’IC congestive, en situation d’urgence aux soins intensifs de cardiologie.

2.4.3 Médicaments agissant sur la troponine

La troponine est une protéine contenant plusieurs sous-unités (T,I,C) qui permet l’interaction entre les fibres d’actine et de myosine grâce à la liaison au Ca²⁺. Le Lévosimendan va augmenter l’affinité du Ca²⁺ pour la troponine C ce qui favorise l’interaction actine/myosine. Ce médicament est inotrope positif et il augmente la fraction d’éjection du cœur sans effet sur fréquence cardiaque et la consommation d’O₂.

Il est utilisé chez des patients en insuffisance cardiaque sévère décompensée, le plus souvent au décours d’interventions chirurgicales cardio-vasculaires (remplacement de valvules, pontages…). Le cœur est extrêmement fragile et met du temps à récupérer. L’injection de lévosimendan renforce les contractions du cœur dans cette indication. Il induit des effets indésirables tels que des troubles du rythme et des céphalées.

3 Médicaments de l’endothélium

Physiologie du NO
 L’endothélium sécrète du monoxyde d’azote (NO) qui induit une vasorelaxation par l’intermédiaire de la formation de GMP-cyclique. L’enzyme responsable de la formation du NO est la NO-synthase, dont il existe 3 types (eNOS, iNOS, nNOS).

Le NO peut également diffuser dans la circulation, il s’oxyde en NO₂ puis NO₃. Le NO₃ induit alors une nitrosylation protéique (modification des fonctions et des structures des protéines du système cardiovasculaire).

Mécanismes des médicaments de l’endothélium
 Les médicaments agissent à différents niveaux sur la signalisation de l’endothélium.

3.1 Donneurs de NO

Le monoxyde d’azote est un gaz administré par inhalation qui dilate du lit vasculaire pulmonaire et induit une bronchodilatation. Il est indiqué dans le traitement en urgence de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), maladie très rare, progressive, qui entraîne une insuffisance pulmonaire chronique.

À ne pas confondre avec le NO₂ (protoxyde d’azote), gaz hilarant utilisé en anesthésie et pour traiter la douleur.

Les dérivés nitrés sont des substances médicamenteuses qui vont libérer du NO dans l’organisme. Le premier médicament est la trinitrine, qui a été découvert par hasard dans les usines d’explosif d’Alfred Nobel. Les poppers sont aussi des donneurs de NO. Ils procurent un sentiment de félicité, d’exaltation et qui relaxent les tissus musculaires : ils permettent d’accroître les sensations sexuelles.

Il existe de nombreux médicaments classés selon le nombre de radicaux NO₂ portés. Exemples : la trinitrine (3 groupements NO₂), le dinitrate d’isosorbide (2 groupements NO₂) et le mononitrate d’isosorbide (un seul groupement NO₂).

La libération de NO est possible grâce à la réduction du NO₂ par un groupement thiol SH, porté par exemple par le glutation. Si on administre un donneur de NO de façon chronique, les agents réducteurs sont consommés et les effets du médicament disparaissent : on parle de tolérance pharmacologique. On étudie principalement la trinitrine.

3.1.1 Indications de la trinitrine

Dynamite
 Dans l’insuffisance coronaire, la trinitrine est indiquée en traitement préventif (dispositif transdermique, patch) et curatif de la crise d’angor, à des doses faibles. Elle est aussi indiquée à des doses moyennes pour traiter la phase aiguë d’un infarctus du myocarde, ainsi que pour améliorer le spasme artériel de l’angor de Prinzmetal. Elle permet aussi d’améliorer les symptômes d’insuffisance cardiaque gauche aigue : l’œdème aigu du poumon (OAP).

Ce n’est pas un traitement de fond ni pour les insuffisances cardiaques chroniques ni dans l’hypertension artérielle car une tolérance pharmaceutique apparaît rapidement.

3.1.2 Effets de la trinitrine

Propriétés pharmacodynamiques de la trinitrine que dans le cadre d’une administration aiguë.

Effets de la trinitrine
 Les effets sur la circulation systémique dépendent de la dose :

Apports sanguins coronaires
 En systole, le sous-endocarde se retrouve en relative ischémie due à l’augmentation des contraintes intra-myocardiques sur les artères coronaires perforantes. La trinitrine diminue ces contraines grâce à la vasodilatation veineuse systémique qui diminue la précharge, réduit la puissance nécessaire en systole ce qui abaisse les contraintes sur les coronaires perforantes.

Effets de la trinitrine sur les coronaires
 En systole, la trinitrine permet de diminuer les contraintes sur les coronaires à faible dose, et de les dilater à forte dose.

La trinitrine entraîne une vasodilatation veineuse dans la circulation cérébrale ce qui induit une céphalée. Au niveau de l’oesophage a des effets antispasmodiques : lorsque la trinitrine est utilisée pour diagnostiquer une maladie coronaire on ne peut pas exclure des spasmes de l’oesophage. Il y a aussi un effet bronchodilatateur.

3.1.3 Pharmacocinétique de la trinitrine

La trinitrine possède une demie-vie très courte : moins de 2 minutes. La biodisponibilité orale est nulle car elle a une dégradation par le foie et le PH gastrique.

On utilise la voie sub-linguale : gélule ou granule que l’on prend sous la langue. La trinitrine est absorbée par la muqueuse sublinguale et rejoint la circulation sanguine sans être dégradée par le foie ou le pH gastrique. Son action est rapide : 1 minute pour avoir les effets.

Par voie transcutanée (pommade, patch) le médicament est diffusé progressivement. Il faut l’appliquer 18h/24h et l’enlever la nuit pour éviter la tolérance. Cette forme est utile pour le traitement préventif.

Il existe aussi des formes gastro-résistantes (microgranules) qui permettent à la trinitrine d’être absorbée au niveau du duodénum (protection du pH gastrique).

3.1.4 Trinitrine : effets indésirables et précautions

La plupart des effets indésirables sont liés à la vasodilatation :

Méthémoglobinémie
 Il existe aussi un risque de méthémoglobinémie (le patient devient tout bleu), lié à un surdosage (existe aussi avec le poppers). La méthémoglobinémie est due à une transformation du Fe²⁺ en Fe³⁺ dans la structure de l’hémoglobine sous l’action du NO₃. Cette transformation induit une mauvaise fixation de l’oxygène sur l’hémoglobine et à terme une mauvaise oxygénation des tissus.

La trinitrine intéragit avec les antihypertenseurs qui majorent la baisse tensionnelle et avec les inhibiteurs de la PDE V (Sildenafil viagra°) qui majorent la vasodilatation et peuvent induire une baisse tensionnelle ou un choc.

3.1.5 Autres médicaments

On utilise la molsidomine per os dans le traitement de fond de l’angor et la linsidomine en injection intra-coronaire dans le traitement d’urgence d’un spasme coronaire aigu. Les effets indésirables : majoritairement des céphalées, ainsi que de l’hypotension.

3.2 Antagonistes des récepteurs de l’endothéline

Pharmacodynamie des Sentans
 Les antagonistes des récepteurs ET-A portent tous le suffixe « SENTAN ». Le Bosentan est le chef de file. Ces médicaments possèdent une affinité pour le récepteur ET-A très supérieure à celle pour le récepteur ET-B : l’endothéline ne peut plus agir sur les récepteurs ET-A reporte son action sur les récepteurs ET-B et favorise une vasorelaxation via la production de NO.

Ce sont des médicaments difficiles à utiliser car il sont à la fois métabolisés par le CYP3A4 et inducteurs de ce même cytochrome. Ils abaissent la pression artérielle systémique surtout au niveau du lit artériel pulmonaire qui exprime beacoup les récepteurs à l’endothéline. Ce sont des médicaments majeurs dans le traitement de fond de l’hypertension artérielle pulmonaire.

3.3 Les inhibiteurs de la PDE V

Troubles de l’érection
 Les inhibiteurs de la phosphodiestérase V (PDE V) possèdent tous le suffixe « AFIL ». Le chef de file est le sidenafil (VIAGRA°). Ce sont des médicaments erectogènes car la PDE V est très exprimée dans le corps caverneux, en l’inhibant on favorise l’apport de sang entraînant l’érection. On peut également les utiliser pour favoriser la vasodilatation systémique et pulmonaire. Ce sont des substrats du CYP3A4.

Ces médicaments possèdent des effets indésirables et des interactions médicamenteuses : ils peuvent induire une vasodilatation excessive entraînant un priapisme (érections anormalement soutenues nécessitant intervention chirurgicale pour libérer les corps caverneux), des céphalées et des bouffées vasomotrices. L’association avec un donneur de NO est une contre-indication car peut conduire à des chocs voire des collapsus. Ils entraînent aussi des troubles transitoires de la vision des couleurs (coloration en bleu).

3.4 Les stimulants de la guanylate cyclase

Une seule molécule est commercialisée : le Riociguat. Il est considéré comme un traitement de dernier recours dans l’HTAP primitive (en attente d’une transplantation du coeur, poumon) ou thrombo-embolique chronique inopérable.

Ces médicaments induisent une vasodilatation systémique et pulmonaire, et sont un substrat du CYP3A4. Les effets indésirables sont encore mal connus même si on décompte déjà les céphalées, les malaises, la dyspepsie, les nausées et les vomissements.

4 Diurétiques

On distingue les médicaments diurétiques ou natriurétiques ou salidiurétiques qui éliminent autant d’eau que d’électrolytes, indiqués dans les pathologies cardiovasculaires et néphrologiques, des aquarétiques qui éliminent plus d’eau que d’électrolytes. Ce sont des antagonistes de l’arginine vasopressine ou ADH. On n’en parlera pas cette année.

Physiologie du glomérule rénal
 Le circuit rénal débute par le tube contourné proximal juste après le glomérule, il se poursuit par la branche descendante de Henlé puis l’anse de Henlé. Après l’anse, la branche ascendante de Henlé remonte et se termine par le segment cortical de dilution. Ce dernier se poursuit par le tube contourné distal. Environ 99% du sodium est filtré par le glomérule et est ensuite réabsorbé dans le tubule rénal :

Sites d’action des diurétiques
 

4.1 Diurétiques thiazidiques

Leur chef de file est l’hydrochlorothiazide, il existe aussi le xipamide, ainsi que des médicaments apparentés aux diurétiques thiazidiques : l’indapamide et le ciclétanine.

4.1.1 Indications

L’hydrochlorothiazide est utilisée, seule ou en association, dans la prise en charge de l’hypertension artérielle, de l’ascite cirrhotique ainsi que dans le traitement des œdèmes (cirrhotiques, rénaux ou de l’insuffisance cardiaque).

4.1.2 Action

Ils agissent au niveau de la terminaison de la branche ascendante de Henlé, dans le segment cortical de dilution, en inhibant le cotransporteur Na/Cl et favorisant l’élimination urinaire de sodium, avec un effet natriurétique peu puissant. Ils augmentent aussi l’élimination de potassium.

4.1.3 Effets indésirables et précautions

Les diurétiques interagissent avec les AINS : on parle de « triple peine » lorsqu’on associe diurétiques + AINS + IEC : on induit une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle.

Ils ont une interaction avec les médicaments hyponatrémiants : tous les autres diurétiques, les IEC, les sartans, les antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, les IRSNA et IRS, les antiépileptiques comme la carbamazépine, les analogues de l’ADH, certains anticancéreux, les SIADH, le mannitol… Mais aussi avec les médicaments hypokaliémiants (CALID : Corticoïdes, Agonistes bêta-2 adrénergique, Laxatifs, Insuline, Diurétiques). Ils interagissent avec le lithium (psychiatrie).

4.2 Les diurétiques de l’anse

Le furosémide (LASILIX°) est de loin le diurétique de l’anse le plus prescrit et le plus utilisé, mais il existe aussi le bumétanide, pirétanide et le torasémide.

4.2.1 Indications

Ces médicaments ont un effet natriurétique puissant comparé aux thiazidiques. Ils possèdent une indication dans le traitement des œdèmes secondaire à l’insuffisance cardiaque, ou d’origine rénale ou hépatique. Ils sont aussi indiqués dans l’hypertension (mais on préfère les thiazidiques pour leur durée d’action plus longue et moins brutale).

Ce sont des diurétiques de l’urgence indiqués notamment dans l’OAP. Ils sont aussi utilisés dans la prise en charge de l’hypercalcémie, mais sans AMM dans cette indication.

4.2.2 Mode d’action

Ces médicaments inhibent les mouvements de sodium et de chlore au niveau de la branche ascendante de Henlé. Ils déterminent une excrétion urinaire de potassium, de chlore, d’H⁺, de calcium et un peu de magnésium.

Illustration diurétiques
 L’accumulation d’ions H⁺ dans les urines détermine une alcalose métabolique et une acidification urinaire. Leurs effets diurétiques, natriurétique et sur la kaliémie ne s’estompent pas en cas d’insuffisance rénale même grave. Leur action intense sur la natriurèse survient rapidement : au bout d’une heure par voie orale, ou dès 5 min par voie IV. De plus elle est brève : moins de 8h par voie orale, moins de 3h par voie IV.

4.2.3 Effets indésirables et précautions

Les effets indésirables sont les même que ceux des thiazidiques, auxquels on ajoute :

4.3 Les diurétiques distaux

Ils sont salidiurétiques comme les 2 autres mais épargnent le potassium et déterminent donc une hyperkaliémie. Il s’agit des antagonistes compétitifs des récepteurs minéralocorticoïdes (RM) dont le plus connu est la spironolactone (ALDACTONE°), ou de pseudo-antialdostérone comme l’amiloride. Les diurétiques distaux sont prescrits souvent en association avec les diurétiques thiazidiques.

4.4 Diurétique osmotique : le mannitol

Le mannitol augmente la pression osmotique, en éliminant l’eau de la cellule. Il est filtré mais non réabsorbées au niveau du tubule rénal : l’osmolarité dans la lumière du tube augmente ce qui diminue la réabsorption d’eau et d’électrolytes.

Il diminue la pression intracrânienne et diminuent la masse liquidienne cérébrale avant les interventions neurochirurgicales (œdèmes intra-cérébraux) ou lors d’AVC hémorragiques. Il permet de baisser la pression intra-oculaire et est utile pour le traitement du glaucome.

4.5 Inhibiteurs de l’anhydrase carbonique

L’acétazolamide (DIAMOX°) est le médicament principal de cette classe.

4.5.1 Effets et indications

Inhibiteur de l’anhydrase carbonique
 L’anhydrase carbonique forme un bicarbonate et un H⁺ à partir de l’acide carbonique. Le bicarbonate est réabsorbé en se complexant avec un Na⁺ ce qui permet l’élimination du H⁺. Les inhibiteurs de l’anhydrase diminuent la réabsorption du sodium favorisent l’effet natriurétique. L’anhydrase carbonique est présente un peu partout dans l’organisme : dans le tubule rénal, au niveau de l’œil, des corps ciliaires, et au niveau des plexus choroïdes dans le SNC.

Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique ont des indications :

Ils déterminent une natriurèse mais acidifient le sang ce qui est intéressant dans la prise en charge de certaines hypercapnies.

5 Dyslipidémies

Dyslipidémies
 Le plus souvent, une dyslipidémie correspond à un dérèglement métabolique induisant une accumulation de cholestérol ou de triglicérides dans le sang. Lorsqu’elle est modérée, il s’agit d’une maladie asymptomatique bénine en soi, mais qui augmente le risque cardiovasculaire. Corriger ce type de problème métabolique est décrit comme une manière de diminuer le risque d’accidents cardiovasculaires (accident vasculaire cérébral AVC et syndrome coronarien aïgu SCA). Il existe beaucoup de promotion dans ce domaine, à propos de remèdes divers et variés.

Pour les dyslipidémies secondaires à une alimentation trop riche en graisses et sucres, le traitement de premier choix est exclusivement basé sur des habitudes hygiéno-diététiques, régimes alimentaires et sport régulier. L’utilisation de médicaments est envisageable uniquement en second choix après échec du changement de mode de vie. Leur efficacité est au mieux modérée, et leurs effets indésirables sont généralement sous-estimés.

Règles hygiéno-diététiques
 Les triglycérides sont la forme de stockage énregétique dans le tissu adipeux. Leur hydrolyse libère des acides gras, substrats énergétiques pour tous les organes et surtout pour le cœur.

Le cholestérol intervient dans la composition normale des membranes cellulaires, une diminution du cholestérol fragilise les membranes de la cellule. Il participe à la synthèse des acides biliaires, de toutes les hormones stéroïdes et de la vitamine D. Il circule dans l’organisme dans les lipoprotéines. Il provient pour ⅓ de l’alimentation et pour ⅔ d’une synthèse endogène que l’on peut inhiber par certains médicaments.

5.1 Alicaments

Les dyslipidémies apparaissent souvent à la suite d’une « dégradation » de l’hygiène de vie, des repas déséquilibrés, une absence de pratique sportive, des aliments sucrés en dehors des repas… Il faut conseiller aux patients de prendre de bonnes habitudes alimentaires et d’activité physique : la dyslipidémie régresse avec l’hypertension, le surpoids, le diabête… Autant de risques cardiovasculaires qui diminuent ensemble.

Cible des alicaments et du régime
 Pour accompagner ce changement de mode de vie, il existe des alicaments en vente libre, à mi-chemin entre le médicament et l’aliment. Ils permettent de faire baisser le taux de cholestérol grâce à leur contenu en acides gras insaturés ω3, mais ne se substituent en aucun cas aux règles hygiéno-diététiques.

Leur effet sur la diminution des risques n’est pas prouvée. Ils sont intéressants dans la mesure où ils accompagnent le changement d’habitudes, mais peuvent provoquer des effets latéraux pervers s’ils sont perçus comme une alternative aux règles alimentaires.

5.2 Inhibiteurs de l’absorption du cholestérol

⅓ du cholestérol est absorbé dans l’alimentation. Les médicaments de cette partie ont pour action de freiner l’entrée du cholestérol dans l’organisme. Malheureusement, aucun d’entre eux n’a prouvé son efficacité dans la réduction des risques cardio-vasculaires.

Inhibiteurs de l’absorption du cholestérol
 

5.3 Inhibiteurs de la synthèse du cholestérol

Les statines ont pour suffixe commun -vastatine. Les premières ont été identifiées à partir de substances naturelles : la mévastatine provient de cultures de penicillium et la lovastatine (monacoline K) est une molécule de la levure de riz rouge (sorte d’alicament).

Inhibiteurs de la synthèse endogène du cholestérol
 Les statines agissent sur le cholestérol endogène synthétisé à partir de l’acétyl CoA. Ce sont des inhibiteurs compétitifs de l’HMG-CoA réductase, qui est l’enzyme clef permettant le passage de l’HMG-CoA au cholestérol.

5.3.1 Indications des statines

Liste des statines sur le marché
 Le cérivastatine a été retiré du marché après avoir tué entre 300 et 350 personnes dans le monde à cause d’effets indésirables musculaires.

Les statines possèdent une indication dans l’hypercholestérolémie, en complément d’un régime adapté et d’une activité physique, mais pas dans l’hypertriglycéridémie. La pravastatine a une indication dans le traitement d’hyperlipidémies dues au traitement immunosuppresseur au décours d’une transplantation.

La simvastatine et la pravastatine (en vert) sont les seules statines à avoir prouvé leur efficacité à réduire le risque cardio-vasculaire. L’atorvastatine (en orange) réduit le risque d’AVC mais pas le risque coronarien, la rosuvastatine et fluvastatine (feu rouge) sont efficaces au niveau biologique mais n’ont aucun rôle démontré dans la diminution du risque cardio-vasculaire.

5.3.2 Effets des statines

L’effet bénéfique des statines sur les maladies cardio-vasculaires, est dû à une combinaison de ces effets. A côté de ces propriétés établies les statines pourraient avoir deux autres effets potentiels pour lesquels il y a des études à l’heure actuelle :

5.3.3 Pharmacocinétique des statines

La métabolisation enzymatique dépend essentiellement du CYT3 A4, mais varie selon la molécule. La simvastatine est exclusivement métabolisée par le cytochrome 3A4 tandis que la pravastatine l’est beaucoup moins.

5.3.4 Effets indésirables et interactions

Le riz rouge n’est pas un médicament mais présente les mêmes risques que les statines.

L’association avec l’alcool augmente le risque d’hépatite médicamenteuse. L’association avec les fibrates est extrêmement déconseillée, et il faut être prudent avec tous les inhibiteurs du CYP3A4.

5.4 Les facilitateurs de l’élimination hépatique

5.4.1 Anti PSCK9

La PCSK9 est une petite protéine s’associe au récepteur des LDL et qui entraîne son internalisation et sa dégradation dans les lysosomes.

Fonctionnement de la PCSK9
 Les inhibiteur de la PCSK9 (pro-protéine convertase de type 9) augmentent le nombre de récepteurs aux LDL : on favorise le mécanisme d’épuration du cholestérol au niveau du foie. On a développé anticorps monoclonaux humains qui augmentent l’effet des statines sur le cholestérol. Ces médicaments sont commercialisés, ils ont fait la preuve de leur capacité à réduire le risque de maladie cardio-vasculaire.

Il existe aussi des ARN interférents avec l’ARN qui code PCSK9 pour empêcher sa traduction et diminuer la protéine de façon durable : le médicament s’appelle l’inclisiran.

5.4.2 Médicaments augmentant le HDL-cholestérol

Les fibrates reconnaissables au sufixe -fibrate ou - fibro. Ils sont indiqués dans les hypertriglycéridémies ou faibles taux de HDL, mais il n’y a aucune preuve de leur efficacité sur des critères cliniques.

Ils agissent en se liant au PPAR-alpha (récepteurs activés par les proliférateurs du peroxysome) pour former un promoteur de la transcription :

Le suffixe “ate” indique que ce sont des acides faibles qui peuvent interagir avec tous les autres acides faibles. Ne pas associer fibrates et statines (sauf circonstances exceptionnelles) car ils ont les mêmes effets indésirables musculaires et hépatiques : risque de potentialisation gravissime des effets indésirables !

La vitamine B3 (acide nicotinique) agit aussi à ce niveau, mais ses propriétés ne sont pas démontrées. Il n’est plus commercialisée en France mais certains patients en achètent sur internet. L’hépatotoxicité de cette substance donne des effets indésirables gravissimes.

6 L’insuffisance cardiaque

L’insuffisance cardiaque est une maladie très fréquente qui touche environ 1 million de personnes en France. Elle concerne 10% de la population âgée de 70 ans et plus. C’est une maladie très grave qui tue plus que le cancer actuellement, 50% des patients décèdent dans les 5 ans après le diagnostic.

L’insuffisance cardiaque
 L’insuffisance cardiaque entraîne une diminution du débit cardiaque. Le corps réagit via la mise en place d’une double stimulation neuro-humorale :

Cette réaction entraîne une vasoconstriction et une rétention hydrosodée conduisant à une augmentation de la post-charge aggravant l’insuffisance cardiaque. De plus, l’activation du système RAA conduit aussi à une fibrose qui aggrave la maladie en rigidifiant le cœur. C’est un cercle vicieux ou la maladie évolue négativement. Les traitements de l’insuffisance cardiaque renforcent l’activité du cœur, diminuent la post-charge et luttent contre la fibrose.

6.1 Les médicaments du SRAA

Voir au dessus. Le premier médicament à instaurer est l’enalapril, un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) qui permet de réduire la mortalité et d’améliorer les symptomes. La dose doit débuter à 2,5 mg/jour et augmenter progressivement jusqu’à la dose efficace, entre 10 et 20 mg/jour en surveillant l’apparition d’éventuels effets indésirables : hypotension orthostatique, hyperkaliémie et insuffisance rénale.

Si l’enalapril n’est pas bien toléré, en particulier en cas de toux due à l’IEC, on peut instaurer à la place un antagoniste du récepteur AT1 à l’angiotensine II comme le candésartan ou le valsartan. Et si le patient est agé de moins de 75 ans, peu sym­ptomatique, avec une baisse importante de la fraction d’éjection ventriculaire gauche, stabilisé, l’association à doses fixes sacubitril + valsartan est une option en remplacement de l’IEC ou du sartan.

La spironolactone, antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoïdes RM possède une indication dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique, par sa double action diurétique et anti-fibrosante. Elle peut toutefois entraîner des hyperkaliémies délétères.

6.2 Les β-bloquants

Ces médicaments sont aussi considérés comme des anti-arythmiques (voir la partie correspondante).

Dans l’IC, l’activation orthosympathique inonde l’organisme de Noradrénaline, ce qui a un effet proarythmogène. Les β-bloquants diminuent la mort subite (par tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire) et diminuent le nombre d’hospitalisations pour décompensation. Autrefois, les β-bloquants étaient contre-indiqués à cause de leur effet inotrope négatif, mais depuis on a montré qu’ils diminuent la mortalité cardiovasculaire chez l’insuffisant cardiaque. Ils sont indiqués en première intention.

6.2.1 Mécanisme d’action

Mécanisme d’action des β-bloquants
 Le mécanisme d’action le plus crédible actuellement est un effet sur la signalisation adrénergique au niveau du cardiomyocyte : l’hyperadrénergie due à l’IC désorganise les récepteurs adrénergiques à la membrane ce qui altère le signal adrénergique. Le β-bloquant permet la prévention des troubles du rythme par antagonisme des effets de la noradrénaline sur l’organisation des récepteurs β-adrénergiques.

6.2.2 β-bloquants de l’IC

Trois β-bloquants ont fait la preuve d’avoir des effets favorables sur l‘IC :

Quand l’insuffisance cardiaque chronique est stabilisée 2 semaines, et en l’absence de brady­cardie et d’hypo­tension artérielle, l’ajout d’un β-bloquant au traitement en cours réduit le risque d’aggravation et la mortalité. Le carvédilol est le bêta­bloquant le mieux évalué.

6.2.3 Précautions d’emploi

Pour réduire le risque d’aggravation, la prise de carvédilol est à débuter à faible dose pour augmenter progressivement en l’absence d’aggravation de la dyspnée, d’hypo­tension artérielle sym­ptomatique, ou de brady­cardie à moins de 50 battements par minute.

6.3 Les digitaliques

Fleurs de digitale
 Les digitaliques ont été découverts par William Withring, médecin et botaniste britannique du XVIIIème siècle, ce sont des alcaloïdes sont issus de la digitale pourpre ou laineuse. Actuellement, seule la digoxine est utilisée pour son effet inotrope positif

Quand les sym­ptômes d’insuffisance cardiaque chronique persistent ou récidivent malgré un traitement bien conduit, l’ajout de digoxine réduit la gêne fonctionnelle et le risque d’aggravation sans diminuer la mortalité liée à l’insuffisance cardiaque.

Les digitaliques sont aussi considérés comme des anti-arythmiques

6.3.1 Propriétés

La digoxine renforce la contraction cardiaque bloquant la pompe Na+/K+ ATPase. Le Na⁺ s’accumule en intracellulaire, la cellule réagit en suractivant la pompe Na⁺/Ca²⁺ : l’accumulation de Ca²⁺ dans le cytoplasme permet :

La digoxine entraîne aussi l’augmentation du tonus vagal qui entraîne un effet chronotrope négatif et un effet dromothrope négatif qui ralentit la conduction au niveau du atrio-ventriculaire.

On parle des « 3R » de la digoxine : renforcement, ralentissement et régulation du cœur. Il existe à l’ECG une « cupule » digitalique qui est témoin de l’imprégnation digitalique (digoxémie).

6.3.2 Effets indésirables et précautions

La digoxine est un médicament à marge thérapeutique étroite. Ses effets indésirables sont souvent des signes de surdose, notamment : anorexies, nausées, vomissements, dia­rrhées. Les autres signes de surdose sont des troubles neuro­psychiques, xanthochromie (perturbation de la perception visuelle en jaune, voir les tableaux de Van Gogh), hyper­­kalié­mies, troubles du ry­thme et de la conduction cardiaques, parfois graves voire mortels.

Il existe beaucoup d’interactions médicamenteuses, en particulier avec des médicaments agissant sur le cœur (antiarhytmiques). La dose de digoxine est à adapter afin d’obtenir une digoxinémie entre 0,5 microg/l et 0,8 microg/l.

6.3.3 Autres inotropes positifs

On les étudie dans la partie sur les anticalciques.

7 Les anti-arythmiques

Anti-arhytmiques
 

7.1 Propriétés pharmacodynamiques générales

Tous ces médicaments dépriment les quatre fonctions élémentaires du myocarde :

LES ANTI-ARYTHMIQUES SONT PARADOXALEMENT ARYTHMOGENES. Ils allongent l’espace QT de l’electrocardiogramme (ECG) et peuvent donner des torsades de pointe avec un risque important de mort subite.

Cercle vicieux
 En médecine, pour éviter les troubles du rythme :

Cette propriété arythmogène des antiarythmiques a été mise en évidence dans l’essai clinique CAST (Cardiac Arythmia Suppression Trial) datant d’il y a 30/40 ans. Les antiarythmiques étaient largement prescrits à l’époque car ils améliorent les troubles du rythme, et on pensait qu’ils réduisaient la mortalité liée. L’essai a été arrêté précocement car il y avait plus de morts à cause des anti-arythmiques qu’avec le placebo. Depuis, ils sont prescrits uniquement à visée symptomatique. Cet essai a remis en cause la pertinence des critères intermédiaires (existence d’un trouble du rhytme) par rapports aux critères durs (mortalité, morbidité, qualité de vie…). Les antiarythmiques ont tué plus que la guerre du Viet-Nam.

7.2 Classification des antiarythmiques

La classification électrophysiologique de Vaughan-Williams ne présente pas de concordance clinique pour les indications mais est utilisée pour le choix des différents antiarythmiques. En effet, elle permet de ne pas associer deux médicaments de la même famille et de passer d’un antiarythmique à une autre classe si jamais il ne fonctionne pas. Moyen mnémotechnique ABCD :

7.3 Inhibiteurs des courants sodiques

7.3.1 Histoire

Quinquina
 La quinidine est un alcaloïde extrait de l’écorce de quinquina, utilisée au départ pour ses propriétés anti-paludiques. Il s’agit du premier des antiarythmiques, elle a une affinité relative pour le cœur, et est très peu utilisée aujourd’hui.

7.3.2 Utilisation

Les quinidiniques ont remplacé la quinidine pour traiter les arhytmies :

7.3.3 Mode d’action

La quinidine et les quinidiniques freinent l’entrée de sodium par les VOCs, ce qui prolonge la phase 0 du potentiel d’action et allonge l’espace QT de l’ECG. Cet effet d’inhibition des canaux sodiques est aussi appelé effet stabilisant de membrane, ou effet quinidine-like.

Les inhibiteurs des canaux Na+ voltage dépendants (VOCs) sont anesthésiques locaux, antiarythmiques et antiépileptiques, « Les antiépileptiques sont les antiarythmiques du cerveau, et les antiarythmiques sont les antiépileptiques du cœur ».

7.4 Les β-bloquants

Tir sportif
 Ce sont des médicaments qui diminuent l’activité orthosympathique en bloquant les récepteurs β à l’adrénaline. Leur nom se termine par le suffixe -olol. Ils possèdent une action indirectement cardio-tranquillisatrice.

7.4.1 Utilisation

7.4.2 Mode d’action

Les effets inotrope et chronotrope négatifs ainsi que la baisse de la pression artérielle sont associés à une diminution du débit et du travail cardiaque ce qui diminue les besoins myocardiques en oxygène.

Leurs propriétés pharmacodynamiques et pharmacocinétiques dépendent de la molécule considérée, et constituent des critères de sélection. Ainsi, le choix d’un ß-bloquant dépendra de l’importance de sa cardiosélectivité, de l’existence d’une activité sympathomimétique intrinsèque, de leur liposolubilité (franchissement ou non de la barrière hémato-encéphalique) ou encore de ses effets stabilisants de membrane du à l’inhibition de courants ioniques (action anti-arythmique), ainsi que l’importance du métabolisme hépatique et/ou de l’élimination rénale.

7.4.3 Effets indésirables et précautions

Il s’agit de bradycardies, d’hypotensions artérielles, de décompensations d’une insuffisance cardiaque, de troubles de la conduction cardiaque, de vasoconstrictions des extrémités, de troubles de l’érection chez l’homme, de troubles nerveux centraux (cauchemars, insomnies…) pour les ß-bloquants ayant une forte liposolubilité, d’aggravation d’un asthme ou d’un syndrome respiratoire obstructif, ou d’épisodes hypoglycémiques chez les sujets diabétiques traités par insuline. Un traitement par ß-bloquant ne doit jamais être arrêté brutalement, au risque de la survenue d’un effet rebond.

Les principales inter­actions des β-bloquants sont liées à une addition d’effets indésirables, notamment cardio­vasculaires.

7.5 Inhibition des canaux potassiques

Le sotalol est un β-bloquant qui est aussi inhibiteur des canaux potassiques de la phase 3 du potentiel d’action. Il est indiqué lorsqu’il n’y a pas d’insuffisance cardiaque dans certaines tachycardies ventriculaires et supra-ventriculaires . Il possède une propriété cardio-tranquillisatrice et il ralentit la repolarisation du cœur. Il est apparenté aux β-bloquants pour les effets indésirables et interactions.

Prévention des récidives des : · tachycardies ventriculaires menaçant le pronostic vital: le traitement doit être instauré en milieu hospitalier sous monitorage; · tachycardies ventriculaires documentées symptomatiques et invalidantes; · tachycardies supraventriculaires documentées lorsque la nécessité d’un traitement est établie en cas de résistance ou de contre-indication aux autres thérapeutiques; · fibrillations ventriculaires. Traitement des tachycardies supraventriculaires : Ralentissement ou réduction de la fibrillation auriculaire ou du flutter auriculaire.

L’Amiodarone (CORDARONE®️) est le médicament de référence pour traiter les troubles du rythme. Elle est moins arythmogène que les autres antiarythmiques et est moins inotrope négative que les autres sauf la digoxine, elle peut être utilisée dans chez l’insuffisant cardiaque. Elle possède une demi-vie longue et variable : de 20 à 100 jours. La posologie repose sur une dose de charge suivie d’une dose quotidienne. A l’arrêt, il y aura une rémanence de l’effet pharmacologique pendant un certain temps, et les effets indésirables peuvent être ressentis des mois après la prise. Enfin, c’est une molécule inhibitrice du CYP3A4 et des PGP, elle est donc sujette aux interactions médicamenteuses.

Pneumopathie à l’amiodarone
 Effets indésirables :

Thésaurismose
 

7.6 Inhibition des canaux calciques L (lents)

Dans cette catégorie on trouve les anti-calciques cardiotropes (inotropes négatifs) :

Ils agissent sur le plateau de la phase 2 en inhibant l’entrée de calcium, ce qui entraîne une triangulation du potentiel d’action en réduisant le temps de repolarisation. Voir la partie sur les anti-calciques.

7.7 Les digitaliques

Voir la partie correspondante dans l’insuffisance cardiaque. La digoxine est le seul anti-arhytmique inotrope positif, elle est utilisable chez l’insuffisant cardiaque. Elle possède une indication dans les troubles du rythme supraventriculaire pour réaliser un ralentissement ou une réduction de la fibrillation auriculaire ou du flutter auriculaire.

8 La tension artérielle

Hypertension Artérielle
 L’hypertension artérielle (HTA) est un facteur de risque cardiovasculaire, mais aussi cérébral, rénal et ophtalmique. Elle concerne 50% de la population au-delà de 50 ans. Certaines mesures non médicamenteuses ont une efficacité démontrée pour réduire modérément la pression artérielle :

8.1 Les diurétiques

Voir la partie correspondante. Tous les diurétiques ont fait la preuve de leur efficacité dans l’HTA, mais parmi eux les diurétiques thiazidiques semblent les plus efficaces. Premier choix en 2019, la Chlortalidone non associée ou l’hydro­chloro­thiazide qui est moins bien étudié mais dont l’efficacité semble similaire.

Les diurétiques sont parfois utilisés en association entre eux (petite dose d’un hyperkaliémiant avec petite dose d’un hypokaliémiant de façon à avoir un effet neutre sur la kaliémie) ou à d’autres médicaments, mais les associations d’hypo­tenseurs de groupes différents n’ont pas d’avantage clinique démontré par rapport à un hypo­tenseur non associé alors qu’elles exposent à davantage d’effets indésirables et d’inter­actions médicamenteuses.

Les doses efficaces sur l’HTA sont faibles. C’est à dire que l’effet anti-HTA n’est probablement pas lié à leur effet sur la volémie mais plutôt à un autre mécanisme, puisque à ces doses faibles on ne diminue pas la volémie.

8.2 Le diabète

Chez les patients diabétiques ou à risque de diabète, on prèfère utiliser un IEC comme le captopril, le lisinopril ou le ramipril (les mieux évalués dans ce contexte, voir la partie sur les médicaments du SRAA) car les diurétiques thiazidiques augmentent le risque d’apparition du diabète.

8.3 Autres médicaments

8.3.1 β-bloquants

Voir la partie sur les anti-arythmiques. Certains β-bloquants possèdent une indication dans le traitement de l’hypertension, ils sont beaucoup moins utilisé actuellement surtout à cause de leurs effets indésirables sur le métabolisme. En particulier, chez la femme aspirant à une grossesse, le médicament de premier choix est le labétalol.

8.3.2 Les IEC et les sartans

Voir la partie sur les médicaments du SRAA.

8.3.3 Les inhibiteurs des courants calciques

Voir la partie sur les anticalciques.

8.3.4 Les agonistes α2 adrénergiques

Ces récepteurs α2 à l’adrénaline sont en position présynaptique, leur strimulation entraîne une diminution de la libération de noradrénaline et favorise la mise au repos du système sympathique. Cependant il a été montré par la suite que la majeure partie de leur effet est due à un autre récepteur, en effet si on retire le récepteur α2 chez une souris les effets persistent.

Histoire de la clonidine : Au départ utilisée en cosmétique dans les mousses à raser car elle hérisse les poils, on découvre fortuitement que ça débouche le nez. Elle a été commercialisée comme médicament symptomatique du rhume pendant longtemps. Un jour la secrétaire du laboratoire prend de la clonidine dans un des cartons pour se déboucher le nez, elle est retrouvée en collapsus cardiovasculaire en état d’hypotension profonde (coma). C’est ainsi que la clonidine devint un anti- HTA depuis les années 70. C’est un médicament peu utilisé aujourd’hui, ses effets indésirables principaux sont une sédation et une xérostomie.

L’Alpha-méthyl-DOPA un faux neurotransmetteur qui possède une action centrale sur les récepteurs α2 adrénergique. Il induit un risque d’anémie hémolytique et d’hépatites immuno-allergiques.

8.3.5 Les antagonistes α1 adrénergiques

Le médicament principal est la prazosine. Il est vasodilatateur et tachycardisant, très efficace sur la diminution de la pression artérielle. Il existe un risque important d’hypotension et de désactivation du baroréflexe entraînant une tachycardie par activation du système nerveux orthosympatique. Cette augmentation de la fréquence cardiaque est délétère sur un cœur fragilisé : ce médicament a été responsable d’une surmortalité cardiovasculaire.

8.3.6 L’hydralazine

Ce médicament est un vasodilatateur sur le muscle lisse vasculaire en passant par la production de NO. Il ne franchit pas la barrière placentaire en cas de grossesse ce qui en fait un traitement possible pour la femme enceinte : il a une indication dans le traitement de certaines pré-éclampsies graves mettant en jeu le pronostic vital maternel. L’hydralazine est le plus souvent utilisée par voie intraveineuse pour le traitement d’urgences hypertensives, souvent en association avec la méthyldopa.

Elle provoque une stimulation sympathique réflexe sur le cœur (baroréflexe) qui peut accélérer la fréquence et le débit cardiaque, ce qui peut conduire à des syndromes coronariens aigüs, chez les patients atteints de maladies coronariennes. Elle peut également augmenter la concentration de rénine dans le plasma sanguin entraînant une hydropisie.