Sémiologie générale
2018-2019
1 Introduction
La sémiologie médicale est la partie de la médecine qui étudie les signes que peut relever le médecin à l’examen clinique ou avec des examens complémentaires. Elle étudie également la manière de les relever et de les présenter afin de poser un diagnostic.
1.1 Définitions
- La clinique est l’art de recueillir les informations nécessaires à la prise en charge du patient par tout moyen rationnel et de les interpréter. Elle regroupe l’anamnèse (interrogatoire du patient, de l’entourage et les comptes rendus médicaux), l’inspection (signes physiques externes visibles), la palpation, la percussion, l’auscultation (écouter les bruits du corps au stéthoscope), et même sentir et goûter parfois.
- La sémiologie est la partie de la médecine qui traite des signes des maladies. Elle regroupe la clinique, la biologie et la radiologie. Par extension, c’est l’ensemble des caractéristiques d’un symptôme, d’un signe physique, d’un syndrome, d’une maladie, d’une image…
1.2 Signes de pancarte
Les signes « de pancarte » correspondent au diagramme de soin (l’expression provient du fait qu’autrefois on utilisait des pancartes au chevet des patients pour noter ces données) :
- Évolution pondérale, température, tension artérielle, pouls, fréquence respiratoire, selles
- État de conscience (score de Glasgow)
- Diurèse
- Douleur
2 L’examen clinique
2.1 Interrogatoire
On dit parfois qu’un bon interrogatoire donne 80% du diagnostic.
2.1.1 Conduite d’interrogatoire
- État civil, la profession (ou ce que fait la personne en pratique), conditions de vie (seule ou entourée, couple ?)
- Motif de consultation/d’hospitalisation
- Recueil et analyse des symptômes (plus la situation est compliquée, plus l’interrogatoire doit être approfondi et précis)
- Le contexte pathologique et les antécédents, voire antécédents familiaux
- Hygiène de vie (notamment le sommeil ou l’alimentation)
- Parcours médical, les médecins impliqués, les examens prescrits et les résultats, les traitements et leurs effets
- Les allergies connues, médicamenteuses et autres
- Les expositions aux toxiques: alcool, tabac, cannabis, autres (mode de consommation, fréquence)
- Les médicaments en cours: nom, posologie, ancienneté de prescription, motif de prescription, éventuelles intolérances?
- L’automédication et les médecines parallèles
2.1.2 Les symptômes
- Ancienneté? Habituels? Intermittents? Permanents?
- Horaires? Conditions de survenue? Facteurs déclenchant?
- Stables ou s’aggravant régulièrement?
- Sensibilité aux médicaments?
2.2 Examen physique
Il comprend l’inspection visuelle, la palpation tactile et percussion du corps, ainsi que l’auscultation (écoute des bruits du corps) à la recherche d’anomalies. Le contexte et les antécédents permettent d’interpréter les données de l’examen clinique et donc de hiérarchiser les hypothèses diagnostiques devant un symptôme/syndrome.
2.2.1 Conduite de l’examen physique
On demande au patient de se déshabiller, au moins en sous-vêtements afin de pouvoir réaliser l’examen dans de meilleures conditions. Il vaut mieux commencer par l’organe en souffrance, puis faire un examen systématique : de haut en bas ou organe par organe. L’examen est guidé par les hypothèses diagnostiques.
2.2.2 Inspection
Depuis le début de la rencontre on peut se faire une idée de l’état général du patient (énergétique, fatigué ?) ainsi que sur son humeur (thymie). On peut aussi remarquer d’éventuelles anomalies du visage (asymétrie? Anomalies oculaires? Chevelure?) ou de la démarche, des déformations physiques. On note aussi l’état bucco-dentaire révélateur du niveau social et de l’hygiène de vie.
Il faut regarder la motricité (marche, équilibre, tremblements…), puis faire une observation plus détaillée du corps afin de noter l’état de trophicité musculaire (nutrition, activité physique), une éventuelle coloration des téguments, des lésions cutanées, des cicatrices.
On peut être vigilant à repérer les signes physiques d’addictions : tabagisme, alcoolisme, drogues, médicaments.
2.2.3 Palpation
Il ne faut pas hésiter à toucher le patient à pleines mains. On peut prendre le pouls, la tension artérielle couché et debout. On peut tester les réflexes si on suspecte un problème neurologique. Les touchers pelviens (prostate pour l’homme, vagin chez la femme) doivent être réalisés si nécessaire.
2.2.4 Percussion
La percussion sur certaines zones du corps permet la mise en évidence de signes, par la présence d’un son « mat », comme assourdi ou « tympanique », qui résonne.
2.2.5 Auscultation
On écoute principalement le cœur et les poumons :
Mais il arrive que l’on écoute l’abdomen et les vaisseaux.
2.3 Rédaction de l’observation médicale
Il faut regrouper les symptômes signifiants en syndromes cohérents qui explicitent des mécanismes lésionnels et évoquent des diagnostics correspondants. On propose ensuite une synthèse diagnostique, puis on pose des hypothèses diagnostiques et des examens complémentaires.
3 Les signes généraux
Nous allons détailler les quatre signes généraux. Si lors d’un examen, un patient présente au moins 2 signes parmi les 3 premiers, on parle d’altération de l’état général (AEG), qui peut être fébrile ou non fébrile.
3.1 Asthénie
3.1.1 Définitions
- Fatigue : sensation normale de lassitude limitant les performances physiques, disparaissant au repos.
- Fatigabilité : fatigue anormalement précoce après un effort.
- Asthénie : sensation anormale de lassitude limitant les performances physiques, ne disparaissant pas au repos.
L’asthénie est dite chronique si elle dure depuis plus de 6 mois (les causes de l’asthénie chronique ne sont pas les mêmes que celle de l’asthénie aigüe de moins de 6 mois). Elle peut aussi varier selon un rhytme circadien (variations au cours de la journée) qu’il faut caractériser. Elle peut être accompagnée de troubles du sommeil.
3.1.2 Composantes
- Une asthénie organique est causée par la défaillance d’un organe. Elle s’aggrave à l’effort ou en fin de journée. Les signes permettant d’orienter vers une cause organique sont la fièvre et/ou des signes de défaillance d’organe.
- Une asthénie intellectuelle ne possède pas de signes spécifiques.
- L’asthénie psychique est présente dès le matin, entraîne des difficultés d’endormissement (anxiété) ainsi que des réveils nocturnes spontanés. Ce sont des signes de dépression.
- L’asthénie sexuelle correspond à une baisse de la libido. Elle peut avoir des causes psychogènes ou souvent hormonales.
3.1.3 Asthénie isolée/prédominante
L’asthénie isolée peut être psychogène (épisode dépressif majeur) ou organique, signe de certaines pathologies :
- Endocrinopathies hypométaboliques (hypothyroïdie, insuffisance surrénalienne)
- Anémie
- Hépatite
- Troubles métaboliques : Carences martiales (déséquilibre entre les apports et les besoins en fer), hypercalcémie, hypokaliémie, hyponatrémie
- Viroses : virus d’Epstein Barr EBV, responsable de la mononucléose entre autres
- Insuffisance rénale
Mais il peut aussi s’agir d’une situation physiologique particulière : une grossesse débutante.
3.2 Amaigrissement
3.2.1 Définiton
L’amaigrissement désigne une diminution du poids du corps. Il est nécessaire d’objectiver l’amaigrissement en réalisant des pesées, avec la même balance de préférence. L’amaigrissement est significatif si la perte de poids est supérieure à 10% du poids du corps en 6 mois.
Si on n’a pas les données de pesées, on peut l’évaluer en observant un éventuel changement de taille de vêtements. Il faut distinguer amaigrissement volontaire et involontaire.
3.2.2 Causes
L’amaigrissement peut être dû à un défaut d’apport : on parle de dénutrition. Elle peut être psychogène (anorexie mentale ou dépression) ou due à une inflammation chronique (néoplasie, infection chronique, maladie auto-immune systémique) qui entraine la libération de neuromédiateurs qui vont donner une impression de satiété et couper la faim.
Elle peut aussi être le signe d’une parasitose digestive (présence de vers dans les intestins) qui entraîne une malabsorption.
Enfin elle peut traduire un hypercatabolisme (dégradation et/ou utilisation des nutriments trop importante) dont la cause est souvent une néoplasie (cancer), une endocrinopathie hypermétabolique ou une maladie neuromusculaire (fonte du muscle et perte de poids par perte de masse musculaire).
3.3 Anorexie
L’anorexie correspond à une diminution de l’appétit. On distingue l’anorexie non sélective : perte d’appétit pour tous les aliments de l’anorexie sélective.
- Le dégoût de l’eau est causée par une hyponatrémie, hyperhydratation cellulaire.
- Le dégoût des viandes s’observe dans certaines pathologies digestives (le plus souvent hépatique, typique du cancer du foie)
Toute maladie évolutive entraine en pratique une anorexie sauf les pathologies particulières provoquant un amaigrissement sans anorexie.
3.4 Syndrome fébrile
3.4.1 Définition de la fièvre
Le fièvre est définie par un niveau de température corporelle centrale :
- supérieur à 37.5°C le matin
- supérieur à 37.8°C le soir (les activités de la journée augmentent la température)
- Il faut ajouter 0.5°C en deuxième partie de cycle menstruel
- Jusqu’à 38.2°C on parle fébricule, au-delà on parle de fièvre.
Il faut réaliser la mesure de la fièvre dans des conditions thermiques extérieures non extrêmes, le matin au réveil, à distance des repas et à distance de toute activité qui puisse augmenter la température centrale.
Une fièvre qui dure jusqu’à 5 jours est dite aiguë, au-delà de 20 jours on parle de fièvre prolongée. Entre 5 et 20 jours elle est intermédiaire. Il existe aussi des signes d’accompagnement qui orientent vers certaines maladies : frissons, sueurs, céphalées, arthromyalgies diffuses.
La courbe de température doit être systématiquement tracée. Il faut rechercher la prise d’antipyrétiques (paracétamol ou anti-inflammatoire non stéroïdiens) car ils modifient l’aspect de la courbe.
3.4.2 Fièvre intermittente/rémitente
C’est un signe de bactériémie (passage de bactéries dans le sang) et de viroses.
3.4.3 Fièvre hectique / désarticulée
Ressemble à n’importe quoi, pas de périodicité, aucune logique. Causée le plus souvent par une maladie parasitaire : la Leishmaniose.
3.4.4 Fièvre récurrente
C’est une fièvre intermittente qui revient avec une périodicité particulière. Fièvre tierce ou quarte quand les pics fébriles en clocher surviennent respectivement tous les 3 ou 4 jours : typique de paludisme. Tierce pour le paludisme à plasmodium falciparum qui peut être fatal et quarte pour les autres types de paludisme qui ne tuent pas.
3.4.5 Fièvre en plateau
Fièvre sans pics ni diminution. Typique des maladies chroniques stables comme les cancers ou les maladies auto-immunes systémiques.
3.4.6 Fièvre ondulante
Alternance de 2 semaines de fièvre et 2 semaines sans rien. Causée par une maladie rare : la Brucellose (fièvre de malte), maladie infectieuse transmise par le lait de brebis. Fièvre qui fait transpirer et qui donne mal aux articulations (dite fièvre sudoro-algique).
3.4.7 Dissociation pouls - température
Normalement la fréquence cardiaque augmente de 10 battements par minutes pour chaque augmentation d’un degré Celsius de la température centrale. L’absence d’accélération du pouls s’observe pour la typhoïde, la brucellose, la légionellose (bactérie transportée par les conduits aériens, les climatisations), la psittacose (maladie bactérienne transmise par les oiseux causant des pneumopathies), la fièvre médicamenteuse (certains médicaments par des mécanismes centraux donnent de la fièvre comme certains antibiotiques par exemple)
Le pouls grimpant de Mahler : désigne une augmentation importante de la fréquence cardiaque couplée à une fébricule. C’est un signe précoce d’une thromboembolie veineuse (thrombus dans les veines profondes avec le risque de complication majeure qu’est l’embolie pulmonaire).
3.4.8 Les frissons
Ils peuvent apparaître au début de la montée thermique (contractions musculaires désordonnées qui fabriquent la fièvre). On observe des frissons « à claquer des dents » (frissons extrêmes qui conduisent le patient à claquer des dents et à des tremblements) dans des cas de : paludisme, bactériémie, fièvre « canalaire » (présence de bactéries pyrogènes dans les différents types de conduits), et de grippes.
Des frissons à claquer des dents inauguraux sont un signe de bactériémie (patient qui marche dans la rue et qui est pris d’un frisson extrême, se met à claquer des dents et à trembler de façon très importante est une urgence vitale qui nécessite un appel au SAMU).
3.4.9 Les sueurs
Elles accompagnent la défervescence thermique afin d’éliminer la chaleur provoquée par la fièvre. Les antipyrétiques peuvent provoquer des sueurs pour faire diminuer la fièvre.
Les sueurs vespérales ou nocturnes, volontiers « à mouiller les draps » sont un signe important qui permet de suspecter un lymphomes, une tuberculose ou un abcès profond.
Causes de sueurs sans fièvre : hypoglycémie, hypercapnie (apnées du sommeil, problèmes respiratoires…), iatrogène (syndrome sérotoninergique, antidépresseurs…)
3.4.10 Céphalées, Arthromyalgies
La grande difficulté consiste à savoir si ces signes accompagnent la fièvre ou sont des symptômes à part entière d’une pathologie. Leurs caractéristiques lorsqu’ils accompagnent la fièvre :
- Céphalées continues ou pulsatiles, en casque, d’intensité parallèle à la température (quand la température augmentent les céphalées augmentent aussi et vice-versa)
- Arthromyalgies diffuses : montée de fièvre et apparition de douleurs articulaires à posteriori, dûes aux frissons
À différencier d’un signe d’atteinte d’organe : les céphalées évoquent une méningite (la douleur ne sera pas parallèle à la température) et les arthromyalgies peuvent être signe de toxocarose ou de vascularite.
3.4.11 Hypothermie
Il s’agit d’une température corporelle inférieure à 35°C. Elle peut être due à une exposition extrême au froid, une bactériémie à Gramm négatif, une intoxication (alcool, barbituriques), une hypothyroïdie ou insuffisance surrénalienne, une atteinte de l’hypothalamus (tumeurs, causes vasculaires, jouant sur le centre contrôle de la régulation thermique)
4 L’urgence vitale
4.1 Introduction
La première étape est l’identification de l’urgence par évaluation de la gravité du cas clinique. Il faudra éventuellement donner une alerte et orienter le patient vers la réanimation. En même temps, il faut réaliser le diagnostic étiologique pour traiter les causes à l’origine de l’urgence, mais aussi réaliser le diagnostic du retentissement clinique global pour mettre en place un traitement visant à pallier la possible défaillance des organes vitaux (traitement symptomatique).
4.2 Arrêt Cardiorespiratoire
Pour réaliser un diagnostic positif d’arrêt cardiorespiratoire, il faut être en présence des symptômes/signes suivants :
- Abolition de la conscience
- Absence de respiration spontanée
- Absence de pouls. Le pouls radial est difficilement identifiable si vasoconstriction ou en cas d’hémorragie, on préfère chercher le pouls fémoral ou le pouls carotidien.
4.3 Le Choc
4.3.1 Diagnostic positif d’un choc
- Présence d’un collapsus cardiovasculaire, qui est lui-même définit par l’une des deux propositions suivantes :
- Une tension artérielle (TA) systolique < 90mmHg ou < 40 mmHg par rapport à la TA habituelle
- PAM : [(PAS + 2 x PAD) /3] < 65 mmHg (donnée utilisée en Réanimation)
- Présence d’une hyperadrénergie compensatrice, tachycardie et vasoconstriction cutanée. On observe des marbrures violacées au niveau de la peau, une froideur des extrémités et avec un temps de recoloration cutanée de plus de 3 secondes.
- Hypoperfusions d’organes. Le premier organe à souffrir est le rein qui retient l’ion Na⁺ pour compenser la perte de pression artérielle en maintenant la volémie, cela se traduit par une oligurie très importante. Ensuite souffrent les organes nécessitant une perfusion importante comme l’encéphale, le foie, les poumons… La diminution de l’apport d’oxygène est à l’origine d’un métabolisme anaérobie des organes qui se traduit par une acidose lactique qui provoque une dyspnée de Kussmaul (dite « en soufflet de forge », polypnée et hyperpnée). On observe aussi des troubles de l’hémostase prenant la forme d’une coagulation vasculaire disséminée : les plaquettes présentes dans les vaisseaux coagulent et forment des caillots ce qui est à l’origine d’une thrombopénie.
4.3.2 Étiologie
Le choc cardiogénique est dû à une défaillance cardiaque aiguë et s’accompagne de signes d’insuffisance cardiaque gauche et/ou droite.
Le choc septique est dû à une infection grave, bactériémie, septicémie. Il présente une part cardiogénique (insuffisance cardiaque) et une part de vasoplégie (vasoconstriction altérée). On observe un syndrome fébrile ou une hypothermie pour les bactéries Gram négatives, on retrouve un foyer infectieux.
Le choc hypovolémique est dû à une diminution du volume sanguin et se manifeste par une soif. La cause est généralement dans des pertes liquidiennes majeures : diarrhée (choléra), prise de diurétiques, grands brulés avec perte importante de peau ou encore un choc hémorragique (diminution de la volémie par perte de sang) pour lequel on observe des saignements extériorisés ou signes d’hématome profond et un syndrome anémique : pâleur de la peau.
Le choc Anaphylactique (dit allergique) est dû à une vasoplégie (dilation des artères). Il s’observe dans un contexte d’exposition allergique (prise de médicament, piqure d’insecte…) et est accompagné de signes allergiques associés : urticaire, bronchospasme…
4.3.3 Particularités du choc septique
Le premier stade est le Syndrome de réponse inflammatoire systémique (SRIS) qui n’est pas forcément lié à une infection mais parfois seulement à une inflammation :
- T° ≥ 38,3° ou < 36°
- FC > 90/min
- Fréquence Respiratoire > 20/min ou PaCO2 < 32 mmHg
- Globules Blancs > 12 000/mm³ ou < 4000/mm³ ou > 10% de formes immatures
Le second stade associe le SRIS à une infection, on parle de sepsis. Le 3ème stade est le sepsis sévère, on retrouve les signes du choc définis précédemment.
On ne parle de choc septique que lorsqu’il n’y a pas de réponse au remplissage ou à l’administrations de vasopresseurs destinés à faire augmenter la PA. Ce choc est différent des trois autres pour lesquels la présence d’un collapsus suffit à diagnostiquer un choc.
4.4 Signes de défaillances d’organes vitaux
4.4.1 Défaillance cérébrale
Une encéphalopathie entraîne un syndrome confusionnel qui associe les signes suivants :
- Désorientation temporelle et/ou spatiale
- Altération de la vigilance
- Fluctuation des troubles
Il y a une exacerbation vespérale de ces symptômes. Si la cause de l’encéphalopathie est métabolique ou toxique (alcool, médicaments …) il existe un signe supplémentaire : le flapping tremor ou astérixis.
Astérixis : On demande au patient de mettre les bras devant lui, les mains relevées et les yeux fermés, on observe des signes de perte de tonus musculaire en battements d’ailes de papillon avec les mains qui tombent et remontent par à-coups.
Le score de Glasgow était utilisé initialement pour les traumatismes puis a été étendu à toutes les encéphalopathies. Un coma se définit par un score de Glasgow égal à 7 ou moins. Le Coma carus est un état pré-mortem de mort cérébrale, avec un score de Glasgow égal à 3 (score minimum).
- Glasgow 15 : État normal
- Glasgow 13-14 : Hypovigilance
- Glasgow 8-12 : Obnubilation
- Glasgow <8 : Coma
- Glasgow 3 : Coma carus
4.4.2 Défaillance cardiaque
Une syncope ou des lipothymies sont dues à une hypoperfusion du système nerveux central qui peut être due à une insuffisance cardiaque. C’est un motif fréquent de consultation aux urgences.
Une insuffisance cardiaque gauche entraîne un œdème aigu du poumon : le ventricule gauche n’arrive pas à éjecter le sang qui stagne en amont dans l’oreillette et les veines pulmonaires provoquant une augmentation de la pression artérielle alvéolaire et une fuite de liquide vers les poumons (transsudation). Cliniquement :
- Orthopnée (le patient peut respirer assis mais ne peut pas respirer couché)
- Expectoration mousseuse / saumonée dû à la présence de sang : les alvéoles sont remplies de liquide qui remontent jusqu’à la cavité buccale.
- Syndrome de condensation alvéolaire avec crépitants humides des deux champs pulmonaires.
- Bruits de galop apexien (toum toum tac), premier bruit légèrement dédoublé, cœur allongé et un peu déformé.
Signes d’insuffisance cardiaque droite aigue :
- Turgescence jugulaire, accumulation de sang dans la veine cave supérieure à l’origine d’un gonflement important de la veine jugulaire en amont.
- Hépatomégalie douloureuse, augmentation de la pression artérielle dans la veine cave inférieure et dans les veines hépatiques en amont, le foie gonfle et se comprime contre sa capsule entraînant des douleurs
4.4.3 Défaillance respiratoire
• Diagnostic positif en fonction des signes de gravité :
- Hypoxémie : très faible taux de O₂ dans le sang, déclenchant une hyperventilation, polypnée : respiration rapide et superficielle avec une fréquence respiratoire >20/min (normalement entre 12 et 14) ainsi qu’une cyanose, coloration bleutée (oreilles, lèvres, extrémités), et rapidement une encéphalopathie car le cerveau souffre très rapidement de la sous-oxygénation.
- Hypercapnie : augmentation du CO₂ dissous dans le plasma sanguin qui se manifeste par des sueurs, une HTA, une érythrose faciale et une encéphalopathie
- Signes de lutte : mise en jeu/tirage des muscles respiratoires accessoires en plus du diaphragme puisque son fonctionnement seul est insuffisant.
- Signes d’épuisement (respiration inefficace) : respiration paradoxale, balancement thoraco-abdominal.
4.4.4 Défaillance rénale
Le premier signe de défaillance rénale est l’oligurie, c’est à dire une diurèse inférieure à 500 ml/24h ou à 1ml/kg/h.
Les signes d’insuffisance rénale aigue sont l’asthénie, un syndrome confusionnel du à l’accumulation d’urée toxique pour le cerveau, des nausées et vomissements, une péricardite, ainsi que les conséquence des troubles métaboliques (hyperkaliémie, dysnatrémie)
4.4.5 Défaillance hépatique
Dans l’insuffisance hépatique aiguë, une personne peut passer d’un état de bonne santé à un état proche de la mort en quelques jours. Une asthénie est généralement observée.
- La diminution de l’excretion de billirubine entraîne une hyperbilirubinémie mixte (biologie) dont la manifestation clinique est l’ictère, coloration des téguments en jaune, visible précocément au niveau des yeux.
- Le défault de synthèse de l’urée entraîne l’accumulation dans le sang d’ammoniac toxique pour le cerveau, déclenchant une altération de l’état mental (encéphalopathie hépatique).
- Le déficit de synthèse des facteurs de la coagulation entraîne une coagulopathie, dont les manifestations cliniques peuvent être des saignements, un purpura, des angiomes stellaires. L’examen biologique trouvera des facteurs de la coagulation diminués (prothrombine, facteur V).
- La catalyse hépatique des œstrogènes est déficiente, entraînant un hyperoestrogénisme, chez l’homme : diminution de la pilosité, gynécomastie et atrophie testiculaire, chez la femme : aménorrhée, associé aussi à l’apparition d’erythrose palmaire (rougeur des paumes des mains dus à l’apparition de shunts artério-veineux).
- Une hypoalbuminémie apparaît, qui favorise le développement d’ascite et les œudèmes.
Un fetor hepaticus (odeur douceâtre de l’haleine) et des troubles moteurs sont fréquents. On peut aussi remarquer une leuconychie (ongles blancs), ainsi qu’un hypocratisme digital. Une tachycardie, une tachypnée et une hypotension peuvent se produire avec ou sans sepsis. Une insuffisance hépatique aigüe peut conduire à un œdème cérébral dont les signes sont une obnubilation, un coma, une bradycardie, et une hypertension.
5 Douleur
5.1 Mécanisme de la douleur
La douleur peut avoir 3 origines différentes :
- La douleur nociceptive est due à un excès d’information nociceptive relayée par les nerfs sensitifs. Il s’agit d’un signal d’alerte qui permet de protéger le corps contre une agression extérieure, ou de le prévenir d’un dommage.
- La douleur neuropathique est due à une altération des structures qui permettent la transmission de l’information douloureuse. Par exemple une compression d’un nerf spinal, mais aussi un infarctus thalamique..
- La douleur psychogène ne possède pas de cause organique : c’est le cerveau qui dysfonctionne et ressent une douleur.
La durée d’évolution permet de distinguer la douleur aiguë « signal d’alarme » de la douleur chronique « douleur maladie ». La douleur aiguë est un symptôme qui aide au diagnostic et qui généralement décroît et disparaît lorsqu’un traitement étiologique est institué.
5.2 Interrogatoire
Pour caractériser la douleur, on peut demander au patient de remplir le questionnaire de la douleur de Saint Antoine. C’est un questionnaire de 61 mots qualificatifs répartis en 17 sous-classes (9 sensorielles, 7 affectives, 1 évaluative) qui permet en pratique clinique de préciser les participations du sensoriel et de l’affectif dans l’intensité douloureuse.
- Pour évaluer l’intensité de la douleur on utilise le plus souvent une échelle numérique entre 0 (pas de douleur) et 10 (la douleur maximale imaginable)
- La localisation de la douleur est primordiale. Il faut faire montrer au patient le site de la douleur avec la main.
- L’irradiation correspond au trajet douloureux. La douleur n’est pas uniquement ponctuelle mais suit un trajet qu’il faut faire décrire au patient.
- Le mode et les circonstances d’installation de la douleur sont importants. Un début brutal s’appelle « début horaire » et oriente vers une cause traumatique, infectieuse ou vasculaire, alors qu’une apparition lente fait plutôt penser à une maladie dégénérative type arthrose. Une douleur mécanique arrive de manière progressive, réveillée par des contraintes, une douleur inflammatoire arrive de manière rapide voir brutale, caractéristique : la douleur est maximale en deuxième partie de nuit et le matin au réveil.
- Existe-t-il une position antalgique dans laquelle le patient est soulagé, ou au contraire des positions qui exacerbent la douleur ?
5.3 Caractérisation de la douleur
5.3.1 Douleur neuropathiques
Ces douleurs prennent la forme d’un fond douloureux permanent à type de brûlure ou étau avec parfois des sensations de coups de poignard, des brûlures ou de chocs électriques. Ces paroxysmes douloureux peuvent être spontanés ou induits par le froid, l’effleurement, les émotions, la fatigue. Ces sensations s’accompagnent généralement de fourmillements, de démangeaisons, d’engourdissement, de picotements. Une hyper esthésie (abaissement du seuil de déclenchement de la douleur) est aussi fréquente.
Ces douleurs ont la mauvaise habitude de résister aux traitements standards, le diagnostic repose avant tout sur l’interrogatoire et l’examen clinique, la mise en évidence d’une lésion du système nerveux responsable des douleurs confirme le diagnostic.
Par exemple, une douleur de l’hypocondre droit à type de brûlure fait penser à une neuropathie thoracique (zona). Une douleur intense du membre inférieur ou de la fesse qui irradie le long de la cuisse, de la jambe et se termine au niveau du gros orteil oriente sur une douleur sciatique de type L5.
5.3.2 Douleurs nociceptives
Il s’agit de signes d’altération de structures, qui vont orienter le diagnostic :
- Un point de côté ou une pesanteur : douleur localisée qui peut être d’installation brutale.
- Une torsion, un spasme, une colique sont des douleurs nociceptives qui témoignent de la souffrance d’un viscère creux doué de péristaltisme qui tente d’expulser un obstacle. L’organe se détend et cela provoque des douleurs coliques :
- tube digestif : douleur colitique (spasme du colon)
- voies urinaires : (uretère, vessie) colique néphrétique (calculs urinaire ou lithiases)
- voies biliaires : colique hépatique (vésiculaire) ou cholédocienne (pour le cholédoque)
- Une douleur à type de striction ou de crampe indique une pathologie ischémique ou musculaire
5.3.3 Douleur référée
Une douleur référée ou rapportée correspond à une douleur ressentie dans un territoire anatomique qui n’est pas celui dans lequel se trouve le processus lésionnel à l’origine de la douleur. Ce phénomène est principalement déclenché lors d’atteintes viscérales.
Une douleur référée ou rapportée est différente d’une douleur projetée qui correspond à une lésion du trajet nerveux projetée par le cerveau sur le territoire correspondant, par exemple la sciatique.
Ces douleurs référées nous indiquent donc des souffrances d’organe. La douleur est généralement mal localisée, vague et diffuse. Elle est parfois associée à des symptômes du système nerveux autonaume (pâleur, transpiration, nausées, variation de tension artérielle et du rythme cardiaque).
- Une douleur dans le bras gauche chez certains patients peut être le seul signe d’un infarctus du myocarde
- Une douleur à l’épaule droite peut témoigner d’une lésion de la base du poumon, de la vésicule biliaire, du dôme hépatique ou autre dans cette région autour du diaphragme.
- Le signe de Kerr est une douleur projetée sur l’épaule gauche lors de la palpation de la rate. C’est un signe pathognomonique d’une souffrance de rate.
- Le signe de crochetage consiste en une douleur déclenchée par une main positionnée sous l’auvent costal qui tire vers le haut. C’est pathognomonique d’un syndrome douloureux appelé syndrome de cyriax (subluxation postérieure de la côte).
5.4 Particularité de la douleur thoracique
5.4.1 Urgences vitales
Il existe 4 grands types de douleur thoraciques qui sont des urgences vitales à ne faut pas louper. Mnémotechnique, PIED :
- Péricardite : Douleur permanente, rétrosternale. C’est une douleur positionnelle modifiée par la respiration, qui s’aggrave à l’effort car le rythme cardiaque augmente et les frottements aussi. Il existe souvent une position antalgique caractéristique : « la prière mahométane » (penché vers l’avant).
- Ischémie : il s’agit de l’angine de poitrine (Angor) ou de syndrôme coronarien aigu (infarctus). La douleur survient souvent à l’effort. Douleur de type striction (ça « serre ») en rétrosternal avec une projection dans le bras gauche, la mâchoire ou au niveau du creux épigastrique. Cette douleur est accompagnée d’une angoisse.
- Embolie pulmonaire : Douleur sourde très variée de type point de côté. Lorsqu’elle est peu sévère, le caillot bouche la périphérie de la vascularisation pulmonaire et induit une ischémie dans la plèvre avec une douleur de type point de côté. Les plus graves sont dues à une embolie plus proximale, la douleur est moins intense, mais s’accompagne d’une sensation aigüe de mort imminente.
- Dissection aortique : Douleur intense d’installation brutale, dans le dos (postérieure) avec une sensation de déchirure descendante (migratrice). Cette douleur peut être tellement intense qu’elle est parfois accompagnée par un collapsus. Il existe aussi une sensation de mort imminente.
5.4.2 Les différentes douleurs thoraciques
- Fracture de côte : Diagnostic clinique, point de côté douleur à un point précis au touché
- Névralgie intercostale : Douleur qui suit le trajet du nerf intercostal et se loge dans l’irradiation du nerf.
- Trachéite : toux sèche, brûlures et essoufflement.
- Affection œsophagienne : spasmes oesophagiens qui miment en tout point une douleur d’origine cardiaque. Crise aiguë pas forcément déclenchée par l’effort qui peut donner des anomalies électrocardiographiques.